Été 1998. Avec mes parents, nous allons en vacances près de Perpignan. Il faisait beau, la France était championne du Monde et l’adolescent que j’étais se délectait des romans de Bernard Werber (j’ai évolué depuis, rassurons-nous). Pour engranger les kilomètres obligatoires dans le cadre de la conduite accompagnée, nous partîmes une journée à Narbonne. Je ne me rappelle pas de grand chose de cette ville, exception faite de ce disquaire improbable où j’ai trouvé simultanément mes premiers bootlegs de The Presidents of the USA et de Dinosaur Jr. Autant je n’écouterai sans doute plus jamais le premier, autant Dinosaurs Are Still Alive passe encore régulièrement dans mes enceintes. Si on ajoute à ça l’achat à Andorre d’une paire de Reebok Hexalite et de Siamese Dream (je pense que j’ai plus écouté Disarm en 3 semaines que dans les 15 ans qui ont suivi…), je peux affirmer sans trop me mouiller que ce furent sans doute les meilleures vacances en famille de ma vie.

J’aimais donc infiniment Dinosaur Jr. Mais cet achat estival se révéla hyper frustrant : comment un groupe que j’aime tant et qui est aussi bon en live (à en juger par ce CD pirate) daigne-t-il se “séparer” (j’appris plus tard que sur la fin, Dinosaur Jr. c’était en fait J. tout seul et puis quelques potes par-ci par-là), ne me laissant, de fait, aucune chance de les voir en vrai ? Je vivais l’aspect live par procuration : en acoustique avec Martin & Me (qui aura l’insigne honneur de me faire apprécier une chanson des Smiths), les BBC sessions, les John Peel Sessions. Par procuration encore quand, à l’aide d’un internet balbutiant et d’un modem 56K, je téléchargeais tant bien que mal des vidéos de concert lisibles uniquement par Real Player (depuis, Youtube a tout arrangé !). Par procuration toujours quand un aimable festivalier de la Route du Rock, suite à ma remarque sur la coolitude de son tee-shirt à la vache, me racontait ses souvenirs de concerts de l’époque originelle.

Heureusement, côté studio, J. était toujours présent : depuis 2000, avec The Fog, il avait repris exactement là où il s’était arrêté. More Light et Free So Free me convenaient tout à fait. Les chansons étaient là, la voix et les guitares aussi. Tout ! Tout, sauf le nom du groupe.

Et puis, le miracle eut enfin lieu. Un beau jour de 2004 ou 2005, l’annonce tonitruante arriva : J, Lou et Murph sont de nouveau réunis sur scène. Wahou ! Il me faudra quand même attendre fin 2006 et une soirée exceptionnelle avec Sonic Youth pour pouvoir enfin acheter mon propre tee-shirt à la vache et me bousiller les oreilles en faisant face au mur d’amplis sur scène. Mais quel pied !

Depuis, ma vie avec Dinosaur Jr. suit son cours. Les concerts se suivent (Rock en Seine, Trévise, Porto, le Trabendo) et ne se ressemblent jamais. J’ai raté la tournée spéciale pour Bug. J’ai raté la grosse soirée des 25 ans de You’re Living All Over Me à New York. Mais je m’en fiche ! Je sais que je reverrai Dinosaur Jr. tôt ou tard. Beyond, Farm et I Bet On Sky sont tous les trois très bons évidemment (j’ai arrêté mon système de notation, mais ça doit toujours tourner autour de 8,5/10). Several Shades Of Why, l’effort solo de monsieur Mascis, était excellent. Le concert au point FMR itou - seulement entaché par ma timidité chronique qui m’empêcha d’aller parler à un J. en goguette le long du canal avant le concert.

Je suis un fan de base, j’avoue. J’achète à peu près tout ce qui sort (sauf ce qui est honteusement cher et/ou moche). Ma collection de vinyles se complète au fur et à mesure des rééditions. Mais après tout, je pense que tout ça, ce n’est qu’une fuite en avant pour tenter de rejoindre J. qui s’envole avec sa guitare téléguidée (notez l’épanadiplose).